La Türkiye demande aux Alliés de ne pas négliger les défis de sécurité émanant du flanc Sud

20 juin 2022

PHOTOS DE LA VISITE

La guerre déclenchée par la Russie contre l’Ukraine en l’absence de toute provocation menace gravement la sécurité dans la région de la mer Noire, y entrave la liberté de navigation et entraîne de graves conséquences économiques pour les pays qui la bordent. Alors que la Türkiye, à l’instar des autres pays membres de l’OTAN, doit faire face aux répercussions de la guerre brutale menée par la Russie, ses dirigeants rappellent que les défis présents au sud de l’Alliance, dont le terrorisme les migrations de masse ou encore le changement climatique, ne doivent pas être négligés.

Voilà le message principal qui a été transmis aux membres de la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN lors d’une visite à Istanbul et à Adana du 14 au 17 juin. Alors que les dirigeants de l’OTAN préparent le sommet de Madrid, une rencontre cruciale qui se tiendra fin juin, le ministre turc de la défense nationale, Hulusi Akar, a informé les membres de la sous-commission sur les partenariats de l’OTAN et du Groupe spécial Méditerranée et Moyen-Orient (GSM) que les Alliés devaient recouvrer une vision globale de tous les types de menaces auxquelles ils sont confrontés afin d’assurer le bon fonctionnement de l’Alliance. Pour mener à bien la lutte contre le terrorisme, a-t-il ajouté, il faut faire preuve de cohésion, de solidarité et d’unité.

C’est l’avis que partage Tacan İldem, ancien ambassadeur de la Türkiye auprès de l’OTAN et membre du groupe d’experts indépendant sur l’OTAN 2030. Les recommandations du groupe s’articulent autour de trois grandes lignes d’effort : renforcer l’OTAN au niveau politique, augmenter sa puissance militaire et adopter une perspective plus globale.

Plusieurs interlocuteurs turcs ont fait référence aux préoccupations affichées par le pays sur le plan de la sécurité à la suite des demandes d’adhésion à l’OTAN de la Suède et de la Finlande. Parallèlement à la poursuite des efforts diplomatiques, y compris ceux menés par le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, les membres de la délégation ont formulé l’espoir de parvenir à faire tomber les réserves opposées, soulignant que l’adhésion de ces deux pays renforcerait l’Alliance.

La visite a également permis de mettre en lumière le rôle et la contribution de la Türkiye en réponse à la guerre menée par la Russie en Ukraine. Le ministre de la défense a insisté sur le ferme soutien de la Türkiye à l’Ukraine à l'intérieur de ses frontières internationalement reconnues ainsi que sur son appui militaire. La Türkiye a également renforcé sa contribution aux arrangements de défense collective de l’OTAN en augmentant la disponibilité opérationnelle de ses forces assignées à la Force de réaction de l’OTAN, en contribuant à la police du ciel et à la surveillance aérienne ainsi qu’en soutenant les groupements tactiques sur le flanc Est. En outre, M. Akar a souligné la fragilité de la situation sécuritaire dans la région de la mer Noire et toute l’importance d’éviter l’escalade.

Le gouvernement turc s’inquiète particulièrement de l’effondrement des exportations de céréales et d’engrais ukrainiens et russes par la mer Noire. Le professeur Cagri Erhan, président de l’université d’Altınbaş, a expliqué que cette guerre entraînait une hausse des prix des aliments et des matières premières de par le monde. Il a alerté sur le fait que la famine en Afrique serait susceptible de déclencher des nouvelles vagues de migration très déstabilisantes. Aussi le gouvernement est-il en pourparlers avec les autorités des deux pays afin d’établir des couloirs humanitaires pour apporter ces matières premières sur les marchés mondiaux. Cependant, ces couloirs restent fortement minés, et des obstacles diplomatiques continuent à entraver les progrès accomplis.

À Istanbul, Luca Frusone (Italie), rapporteur du GSM, a présenté son avant-projet de rapport Problèmes migratoires communs : la communauté transatlantique et la région MOAN, dans lequel il explore les conséquences de la guerre menée par la Russie, du changement climatique et de la mauvaise gouvernance sur les flux migratoires en provenance du sud. Au cours d’échanges, les parlementaires ont apporté leur contribution à la version révisée du rapport, qui sera présentée en vue de son adoption finale lors du séminaire d’automne du Groupe.

La Türkiye, qui a ratifié l’accord de Paris en octobre 2021, s’engage à lutter contre le changement climatique qui, d’après Fatih Dönmez, ministre de l’énergie et des ressources naturelles, aggrave la situation sécuritaire dans le sud. M. Dönmez a déclaré que malgré l’importance essentielle des combustibles fossiles à moyen terme, il était crucial de diversifier les sources d’énergie et d’incorporer les énergies renouvelables. Il a ajouté que les gouvernements devaient également envisager l’efficacité énergétique comme le « principal carburant » qui permettra d’améliorer la sécurité énergétique et de réduire les émissions de CO2. Le ministre Dönmez a présenté les plans du gouvernement pour réduire de 43 millions de tonnes les émissions de CO2 sur les dix prochaines années, ce qui permettrait à la Türkiye d’économiser 30,2 milliards de dollars par rapport aux prix de 2017.

La délégation a clos sa visite en se rendant dans le plus grand centre d’accueil temporaire du pays situé près d’Adana. La Türkiye accueille quelque 4 millions de réfugiés syriens et cherche à accompagner leur intégration sociale et économique. Comme l’a appris la délégation, si la plupart des Syriens ayant trouvé refuge en Türkiye résident désormais en ville, une partie des plus vulnérables résident encore dans ces abris fournis par le gouvernement où l’État turc, accompagné de plusieurs ONG, apportent un soutien vital aux niveaux social, médical et éducatif. Sur place, les parlementaires ont rencontré le personnel et les résidents du camp et ont participé à une cérémonie de remise des diplômes pour les étudiants qui y poursuivent leurs études.
À Istanbul, la délégation de l’Assemblée s’est également rendue au siège du corps de déploiement rapide de l’OTAN – Turquie, au centre d’excellence pour la sûreté maritime ainsi qu’au siège de la société de technologie et de défense BAYKAR, dont les drones Bayraktar TB2 jouent un rôle vital dans l’effort de défense ukrainien.

Cette délégation parlementaire était menée par Marcos Perestrello De Vasconcellos (Portugal), président de la sous-commission sur les partenariats de l’OTAN, Fernando Gutierrez (Espagne) et Manousos Konstantinos Voloudakis (Grèce), tous deux vice-présidents du Groupe spécial Méditerranée et Moyen-Orient. Osman Askin BAK (Türkiye), chef de la délégation turque à l’AP-OTAN, a servi de guide à la délégation lors de cette visite de quatre jours à Istanbul et à Adana.

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