À Barcelone, un séminaire de l’AP-OTAN met en avant les défis communs et l’interconnexion des questions de sécurité dans la Méditerranée

23 novembre 2021

➡️ Photos du séminaire 


« La stabilité au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et dans le Sahel est essentielle, et la communauté transatlantique n’est pas à l’abri des développements parfois tragiques » qui se produisent dans cette région très étendue et complexe. C’est par ces mots que la députée française et présidente du Groupe spécial Méditerranée et Moyen-Orient (GSM) Sonia Krimi a ouvert un important séminaire parlementaire organisé par le parlement espagnol à Barcelone. L’interconnexion des questions de sécurité a été le grand thème sous-jacent des échanges menés entre les parlementaires des pays européens et de la région MOAN, des hauts fonctionnaires, des diplomates, des experts et des étudiants. 

Soulignant l’importance d’entretenir le dialogue dans et avec la région, la ministre espagnole de la défense Margarita Robles Fernandez a envoyé le message vidéo suivant : « la Méditerranée doit être un lieu de paix et de dialogue. Nous devons tout faire pour que les pays méditerranéens mettent leurs différences de côté et se concentrent sur leurs points communs. L’OTAN a un rôle central à jouer dans cet effort ». 

L’immigration irrégulière est l’un des défis que l’Europe et ses voisins du sud doivent relever ensemble. Ignacio Fuente, de l’Institut d’études stratégiques du ministère espagnol de la défense, a présenté les grands facteurs de migration entre la région MOAN et l’Europe, tels que les tendances démographiques divergentes, les inégalités croissantes, la proximité géographique, les conflits, le changement climatique et, plus récemment, la pandémie de Covid-19. M. Fuente a ajouté que ces facteurs touchaient différemment le Maghreb et l’Afrique sub-saharienne et pourraient, sur la durée, contribuer à une hausse des flux migratoires au sein de la région. 

Les routes de l’immigration irrégulière en direction de l’Europe changent en permanence. Récemment, lorsque le passage par la Méditerranée orientale est devenu plus difficile, les flux migratoires ont considérablement augmenté en Méditerranée occidentale. Immédiatement concernée par cette évolution, l’Espagne a constaté une augmentation de l’immigration irrégulière, notamment aux îles Canaries et dans les villes autonomes de Melilla et Ceuta sur la côte nord-africaine. 

Les aspirations et les reculs démocratiques ont également été abordés pendant le séminaire. Ander Gil Garcia, président du Sénat espagnol, a fait savoir que « la défense de la démocratie et de ses principes ne s’arrête pas aux frontières de l’UE. Nos peuples, en plus de partager un même voisinage, partagent aussi les mêmes défis et, bien entendu, certains espoirs. L’un d’eux est la démocratisation des pays situés sur l’autre rive de la Méditerranée ». Il a exprimé son soutien à la proposition de l’Assemblée d’établir un Centre pour la résilience démocratique au siège de l’OTAN pour centraliser les bonnes pratiques et favoriser les échanges sur les critères démocratiques entre les pays membres, les partenaires et les candidats à l’OTAN. 

Au sujet de la situation en Tunisie, où le président Kaïs Saïed a suspendu le Parlement, Monica Marks, professeure à NYU Abou Dhabi, a remarqué que le pays commençait l’hiver sans parlement, avec des procédures démocratiques en panne et une économie très vulnérable dont la situation n’a fait qu’empirer à cause de la pandémie. Vincent Geisser, chercheur à l’Institut de recherches et d'études sur les mondes arabes et musulmans (IREMAM) du CNRS, a dit à l’assemblée que « les limites, les soubresauts et les dysfonctionnements de la démocratisation de la Tunisie reflètent également les faiblesses politiques et les vulnérabilités de la démocratie en Europe et en Amérique du Nord ». « Notre meilleure réponse est de montrer l’exemple », a-t-il ajouté. 

Les participants ont salué le dialogue et la coopération politiques de l’OTAN avec les pays de la région sur des questions communes. 

Meritxell Batet Lamaña, présidente du Congrès des députés, a fait remarquer qu’en Méditerranée, « il n’y a pour l’instant aucune garantie minimum en matière de sécurité, condition pourtant nécessaire à la coexistence et au développement de la liberté. C’est pourquoi nous devons utiliser nos instruments les plus efficaces pour défendre notre sécurité collective et individuelle, à commencer par l’OTAN, ses nombreuses capacités et ses nombreux outils. » 

Giovanni Romani, chef de la Section Moyen-Orient et Afrique du Nord de l’OTAN, a présenté les différents outils d’engagement de l’Alliance avec les pays et les organisations de la région, de la Mauritanie au Golfe. Les Alliés ont également prévu d’évoquer les relations avec la région MOAN dans le nouveau concept stratégique actuellement en développement. Dans un rapport du GSM de l’AP-OTAN sur l’Iraq, adopté lors de la réunion à Barcelone, le rapporteur Ahmet Berat Conkar (Turquie) identifie la mission de formation de l’OTAN comme l’un des moyens par lesquels les Alliés peuvent aider des pays confrontés à des crises complexes à favoriser la paix, la sécurité et le développement. 

L’ingérence continue de l’Iran dans les affaires politiques iraquiennes reste un défi majeur, même si les récentes élections en Iraq traduisent une fatigue croissante du peuple face à l’intrusion iranienne. Les dirigeants iraniens restent déterminés à établir une « profondeur stratégique » au moyen d’acteurs intermédiaires dans la région. Ainsi, Téhéran a une raison stratégique qui explique la persistance de son ingérence, a suggéré Thierry Coville, chercheur à l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS). 

En parallèle, les négociations pour relancer le Plan d’action global commun se poursuivent. La reconfiguration en cours dans le Golfe a permis la réconciliation avec le Qatar, l’ouverture des échanges avec Israël et un dialogue limité avec l’Iran, a fait comprendre Neil Quilliam, membre associé du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord à Chatham House. 

Pendant les deux jours de réunions, les participants ont également parlé du conflit israélo-palestinien, des défis sécuritaires et diplomatiques au Sahel, de la sécurité humaine dans la région MOAN et du conflit en Libye. Plus de 50 parlementaires venus de 24 pays membres de l’OTAN et de la région MOAN étaient présents à Barcelone. La sous-commission sur les partenariats de l’OTAN, présidée par Marcos Perestrello (Portugal), s’est associée au GSM pour ce séminaire. 

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