Pour les dirigeants de la République de Macédoine du Nord, l’accession à l’OTAN est la clé de la stabilisation de la région et de la réforme intérieure

19 mars 2019

Skopje/Bruxelles, le 18 mars 2019 – Après avoir défendu longtemps et activement sa candidature à l’accession à l’OTAN, la République de Macédoine du Nord est désormais en passe de devenir membre à part entière de l’Organisation depuis le règlement du litige qui l’opposait à la Grèce autour de la question de son nom. Les parlements de huit pays alliés ont ratifié le protocole d’accession depuis la signature de celui-ci au siège de l’OTAN, en février dernier, et d’autres les imiteront vraisemblablement dans les mois à venir. Outre que l’accession devrait contribuer à consolider la transition démocratique de la Macédoine du Nord et renforcer le sentiment de sécurité dans les Balkans occidentaux, elle a d’ores et déjà galvanisé les investissements étrangers et donné un second souffle à l’approfondissement de la réforme ; elle peut donc constituer le point de départ d’une demande d’adhésion de Skopje à l’Union européenne.

Lors d’une visite de travail dans la capitale nord-macédonienne les 14 et 15 mars, une délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN) a discuté de ces questions – parmi d’autres – avec des députés de l’Assemblée de Macédoine du Nord, les titulaires des principaux portefeuilles ministériels, ainsi que plusieurs diplomates et spécialistes.

Des acteurs de la scène politique de Macédoine du Nord et des membres de la communauté diplomatique ont souligné que les autorités de Skopje et d’Athènes avaient fait montre d’un courage extraordinaire en signant l’accord de Prespa et qu’elles avaient ainsi redonné espoir à une région en proie depuis bien longtemps à des tensions nationales, ethniques et confessionnelles. Le ministre des Affaires étrangères, Nikola Dimitrov, a déclaré aux membres de la sous-commisson sur la transition et le développement de la Commission de l’économie et de la sécurité de l’AP-OTAN qu’après les turbulences politiques de 2015 et 2016 son pays avait décidé de faire face à ses responsabilités dans le traitement de toute une série de problèmes et que la signature de l’accord de Prespa marquait le franchissement d’une étape essentielle à cet égard.

Le premier ministre, Zoran Zaev, a affirmé que l’accession de la Macédoine du Nord à l’OTAN aurait des effets très positifs et contribuerait à une consolidation de la sécurité dans la région. La communauté internationale sera ainsi amenée à prêter plus d’attention aux différends qui perdurent dans cette partie du monde, tels que les tensions entre Priština et Belgrade ou l’impasse politique doublée d’une crise institutionnelle qui s’est installée en Bosnie-Herzégovine.

Les bienfaits d’une démarche aussi audacieuse que risquée, politiquement parlant, sont déjà visibles. Non seulement l’accord de Prespa a immédiatement placé la République de Macédoine du Nord sur la voie de l’adhésion à l’OTAN, mais elle a engendré des avantages économiques. Le ministre de l’économie, Krešnik Bekteši, a indiqué que le pays avait retrouvé le chemin de la croissance et qu’un afflux considérable d’investissements étrangers directs avait été constaté depuis la signature de l’accord. En 2018, a indiqué M. Bekteši, les investissements étrangers se sont montés à 624,6 millions d’euros et ils devraient excéder le milliard cette année.

Pourtant, la République de Macédoine du Nord reste confrontée à de sérieux problèmes liés à la transition. La question du nom lui a longtemps barré la route de l’OTAN et de l’Union européenne ; par voie de conséquence, elle a aussi émoussé l’impulsion réformiste et même provoqué une régression de la démocratie. Cela est clairement apparu pendant la crise politique de 2015 et 2016, lorsque la démocratie elle-même s’est manifestement trouvée en danger. Toutefois, d’autres problèmes persistent, dont une corruption tenace, un système d’éducation médiocre, un vaste secteur informel, un exode constant des jeunes diplômés en direction des États membres de l’Union européenne et les insuffisances des appareils judiciaire et juridique.


Pour les autorités de Skopje, la perspective bien réelle d’une intégration euro-atlantique permettra d’engager des réformes plus amples et plus profondes capables de résoudre ces problèmes. Le processus a déjà commencé avec la création d’une nouvelle commission de lutte contre la corruption et le lancement d’une grande réforme du secteur de la sécurité grâce à laquelle les services concernés auront beaucoup plus de mal à se livrer à l’espionnage intérieur, pratiques devenues notoires en 2015.

Le fait que plus de 80 % de la population appuient les aspirations euro-atlantiques du pays devrait faciliter l’introduction de réformes supplémentaires, ont souligné les interlocuteurs de la délégation, qui ont aussi demandé aux dirigeants de l’Union européenne de prendre acte des progrès accomplis en autorisant l’ouverture de négociations sur l’adhésion de leur pays lors de la réunion du Conseil européen qui doit avoir lieu en juin prochain.

La visite s’est achevée par une rencontre avec la ministre de la défense, Radmila Šekerinska. Celle-ci a rappelé à la délégation – qui était conduite par Osman Așkın Bak (Turquie), vice-président de l’AP-OTAN, et Matteo Bianchi (Italie), vice-président de la sous-commission sur la transition et le développement – que son pays avait exécuté 18 plans d’action pour l’adhésion et pris part à de multiples missions de l’OTAN. Tout cela a contribué à préparer la classe politique et les forces armées nord-macédoniennes à leur entrée dans l’Organisation. Une fois devenue membre à part entière de l’Alliance, la République de Macédoine du Nord sera un fournisseur de sécurité. La ministre a fait observer que le pays accueillerait cet été un exercice militaire de grande envergure auquel participeraient plusieurs Alliés et qu’il prévoit d’atteindre pour 2024 l’objectif consistant à consacrer 2 % de son produit intérieur brut à ses dépenses de défense.

Mme Šekerinska, de même que les députés – majorité et opposition confondues – et le président de l’Assemblée de Macédoine du Nord, Talat Xhaferi, ont invité instamment les membres de la délégation à relayer ces messages auprès de leurs parlements respectifs, au moment où ceux-ci se penchent sur la ratification du protocole d’accession du pays à l’OTAN. Tous espèrent qu’avec l’aide de l’AP-OTAN le processus d’accession parviendra à son terme plus tôt que prévu, de sorte que la République de Macédoine du Nord puisse participer au sommet des chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’OTAN qui doit se tenir à Londres en décembre 2019.

La sous-commission sur la transition et le développement s’est rendue à Skopje dans le contexte de la rédaction d’un rapport sur l’économie de la Macédoine du Nord, rapport qu’elle débattra cette année. Une première version de ce document, due à la députée Aušrinė Armonaitė (Lituanie), sera présentée durant la session de printemps de l’AP-OTAN qui aura lieu du 31 mai au 3 juin 2019 à Bratislava (Slovaquie).

 

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